Accord vins et fromages : une question de sens !

L’ampleur du problème

La réputation des maîtres de maison se joue sur la qualité des mets mais aussi sur leur aptitude à les sublimer par les vins qu’ils serviront. Et dans le pays qui est le nôtre, l’accord entre les vins et les fromages constitue spécifiquement, surtout vis-à-vis de nos hôtes étrangers, un enjeu culturel de premier plan, où se joue la réputation nationale du bon goût français dont nous sommes tous dépositaires. A croire que tout faux pas susciterait une crise diplomatique inédite.

C’est là que se noue le problème car selon des statistiques récentes, il existerait en France plus d’un millier de fromages différents. Allons, ne cherchons pas la complication et tenons nous-en au nombre d’appellations : 45. Faisons de même pour les vins : 340 AOC et 160 IGP. Ce qui ne nous laisse pas moins de 22500 possibilités !

Ce petit détour mathématique a de quoi faire tourner la tête et justifie le clin d’œil condescendant de l’initié qui, conscient de détenir l’intégralité d’une science ancestrale, vous proposera d’un air docte un bon Bordeaux sur le Camembert.

L’ampleur de la solution

Sans hurler à l’hérésie et à la faute de goût rédhibitoire, sans tomber non plus dans des considérations alchimiques, tentons d’y voir plus clair. Les vins rouges en général vont développer un goût amer sur les pâtes molles à pâte fleurie comme le Brie de Maux ou le Camembert, alors qu’un vin blanc sec, tel que le Bourgogne Aligoté fera merveille. Un vieux mythe, pourtant solidement ancré, s’écroule. Nous voilà sans repère. Calmement, reprenons les fondements, par type de fromage.

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Le vin blanc, généralement, se mariera plus facilement qu’on ne le croit avec bon nombre de fromages. Un blanc sec accompagnera agréablement les fromages frais (chèvre frais, fêta, mozzarella…) et les pâtes molles à pâtes fleurie (Camembert, Brie, Brillat-Savarin…), ainsi qu’avec des pâtes pressées cuites jeunes avec des durées d’affinages de moins de 18 mois (Comté, Beaufort…) ou les chèvres. D’ailleurs, un bleu (Roquefort, Gex ou Fourme d’ Ambert…) se mariera à merveille avec un blanc légèrement moelleux, l’alliance avec un rouge charpenté ne se révélant pas très heureuse.

Le rouge serait-il proscrit du plateau de fromages ? Non, rassurez-vous. Il se marie de manière très heureuse avec les pâtes pressées non cuites (Saint Nectaire, Tomme des Pyrénées ou de Corse, Reblochon…). Mais un accord entre vins et fromages est, comme toute alliance, une question d’équilibre et d’harmonie. Il s’agit d’éviter que l’un prenne le pas sur l’autre, et qu’une synergie se crée entre les arômes sans que cela se fasse au détriment de l’un des deux. Avec les croûtes lavées (Pont L’Evêque, Epoisses, Munster…), un rouge un peu charpenté pourra sublimer les arômes. Sur un Saint Nectaire par exemple, on prendra soin de ne pas choisir un rouge trop « costaud ».

Dans une relation équilibrée, les caractères s’ajoutent et ne s’annihilent pas. Il faut rechercher l’alliance et l’harmonie plus que la confrontation, en prenant en compte le caractère et les spécificités de chacun. Nous détenons tous au fond de nous, instinctivement et par l’apprentissage les clés de ces alliances réussies. L’expérience raisonnée constituera la meilleure base du bon goût.

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Une question de (bons) sens

Et si pour résoudre cette équation compliquée, nous prenions les choses à l’envers ? On ouvre en général une bouteille de vin et on garnit son plateau de plusieurs fromages. Mathématiquement, il sera donc plus aisé d’adapter son plateau de fromage au vin que l’inverse. Voici donc une petite suggestion, qui pourra se décliner ensuite au gré des vos envies : une bouteille de Château Beauferan Blanc, qui sera servie sur un plateau constitué d’un Roquefort, un Comté douze mois, un chèvre tel qu’un Pélardon légèrement affiné, et un Brillat-Savarin.

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